Tremblay c. Mpantis et Conseil de discipline de l’Ordre des dentistes du Québec, C.A., 15 mars 2023, 500-09-029877-222 et 500-09-029891-223

Les faits

Deux professionnels, tiers au litige, sont consultés par la syndique adjointe et son avocate postérieurement au dépôt d’une plainte disciplinaire et en préparation de l’audition sur le fond. La syndique adjointe désire obtenir leur opinion sur des contradictions entre les expertises des deux parties.

Étant mis au courant de ces démarches, Dr Tremblay présente une requête en arrêt des procédures au motif que ces consultations et les opinions émises par ces professionnels ne lui ont pas été divulguées.

Dans le cadre de l’audition de cette requête, mais également de l’audition au mérite, le Conseil rejette certaines objections faites par l’avocate de la syndique adjointe à des questions en lien avec ces consultations, lesquelles objections sont formulées sur la base du privilège relatif au litige et du secret professionnel.

La décision de la Cour supérieure 

En révision judiciaire, la Cour supérieure se rallie à la conclusion du Conseil de discipline quant au privilège relatif au litige. Le tribunal applique les exceptions à ce privilège précisant qu’il ne permet pas d’éviter la divulgation d’un élément de preuve qui peut (1) servir à établir l’innocence d’un intimé et/ou (2) à démontrer un abus de procédure ou une conduite répréhensible de la partie qui le revendique.

Le pourvoi en contrôle judiciaire est cependant accueilli en ce qui concerne l’objection basée sur le secret professionnel.

La décision de la Cour d’appel

Sur la question du secret professionnel, la Cour d’appel confirme la décision de la Cour supérieure et conclut que le Conseil de discipline a erré en levant le secret professionnel de l’avocat.

La Cour, toutefois, intervient et infirme la décision quant à l’application du privilège relatif au litige. Elle soulève, en premier lieu, que l’exception relative à l’innocence de l’intimé – qui permet d’écarter ce privilège et sur laquelle s’appuie notamment la Cour supérieure – n’était pas invoquée par le Dr Tremblay.

Concernant l’exception au privilège relative à un abus de procédure ou une conduite répréhensible, la Cour rappelle qu’une preuve prima facie d’un tel abus d’une telle conduite doit être présentée par celui qui invoque l’exception. Le Dr Tremblay n’ayant pas présenté une telle preuve, l’exception ne trouve pas application en l’instance.

Ce qu’il faut retenir

Par cet arrêt, la Cour d’appel confirme que le privilège relatif au litige, qui permet aux parties d’élaborer leur stratégie en toute confiance et à l’abri d’une divulgation forcée, s’applique en droit disciplinaire québécois. Aussi, la partie qui invoque l’exception du privilège relatif au litige pour abus de procédure ou conduite répréhensible doit en faire la preuve prima facie.