Au cours des dernières années, les gouvernements fédéral et provincial ont déployé d’importants efforts pour améliorer la transparence des entreprises et lutter contre la corruption, l’évasion fiscale et le blanchiment d’argent. Pensons notamment à l’obligation pour les sociétés fédérales de tenir un registre des personnes exerçant un contrôle important. Dans ce contexte, l’Assemblée nationale a sanctionné le projet de loi no 78 le 8 juin 2021 (le « PL-78 »), qui modifie la Loi sur la publicité légale des entreprises (la « LPLE »). Les nouvelles dispositions de la LPLE instaurent l’obligation de transmettre au Registraire des entreprises du Québec (le « REQ ») l’information relative aux « bénéficiaires ultimes » des entreprises et permettront la recherche d’information au moyen du nom d’une personne physique. L’entrée en vigueur des nouvelles obligations sera le 31 mars 2023.

Nouvelles obligations

Les entreprises suivantes immatriculées au REQ (québécoise, canadienne ou étrangère) devront déclarer certaines nouvelles informations publiquement, notamment quant à leurs bénéficiaires ultimes, et ce, afin d’éviter l’usage de prête-noms à des fins d’évitement fiscal :

  1. Les sociétés par actions;
  2. Les personnes physiques exploitant une entreprise individuelle;
  3. Les sociétés de personnes (ex. : sociétés en commandite, sociétés en nom collectif);
  4. Les coopératives à l’exception des coopératives de services financiers;
  5. Les fiducies exploitant une entreprise à caractère commercial.

Ces entreprises devront dorénavant divulguer également au REQ, les renseignements suivants sur toutes personnes physiques (administrateurs, dirigeants, actionnaires et bénéficiaires ultimes) :

  1. Nom et prénom;
  2. Domicile (adresse de résidence personnelle et professionnelle de la personne physique si cette personne ne souhaite pas rendre accessible au public son adresse résidentielle); et
  3. Date de naissance (cependant, cette information ne sera pas publiée au REQ et ne sera donc pas publique),

ainsi que les renseignements suivants sur les bénéficiaires ultimes :

  1. Autres noms utilisés (ex. pseudonyme);
  2. Date à laquelle elle est devenue et/ou a cessé, selon le cas, d’être un bénéficiaire ultime; et
  3. Type de contrôle exercé par un bénéficiaire ultime ou le pourcentage d’actions, de parts ou d’unités détenues ou dont il est bénéficiaire.

De plus, les assujettis devront fournir, à l’égard de leurs administrateurs, une copie d’une pièce d’identité gouvernementale pour chaque administrateur actif au REQ et pour l’ajout de tout nouvel administrateur élu, afin d’optimiser la fiabilité des informations contenues au REQ.

Nous déconseillons vivement à nos clients de transmettre leurs pièces d’identité par courriel. Si vous désirez que nous procédions au dépôt des pièces d’identités des administrateurs de votre société, veuillez nous contacter et nous vous fournirons un accès à une plateforme sécurisée.

Par ailleurs, le nom de toutes personnes liées (administrateurs, actionnaires, dirigeants et bénéficiaire ultime) ainsi déclaré pourra servir de critère de recherche lors d’une recherche au REQ à compter du 31 mars 2024. Le public pourra ainsi identifier toutes les entreprises ayant des liens avec cette personne. Toutefois, les informations qui ne peuvent être consultées (ex. date de naissance) ne pourront servir de base pour une recherche.

Certaines entreprises seront toutefois exemptées de cette nouvelle obligation de déclarer ses bénéficiaires ultimes, notamment :

  1. Les personnes morales de droit privé sans but lucratif; 
  2. Les personnes morales de droit public; 
  3. Certaines institutions financières;
  4. Les banques; et
  5. Les associations au sens du Code civil du Québec.

Définition du bénéficiaire ultime

Le concept de « bénéficiaire ultime » renvoie à l’idée de contrôle de droit ou de fait d’une entité juridique. Ainsi, en vertu de la nouvelle loi, un bénéficiaire ultime s’entend de toute personne physique qui satisfait à l’une ou l’autre des conditions suivantes relativement à un assujetti :

  1. Elle détient, même indirectement, ou bénéficie d’un nombre d’actions, de parts ou d’unités de l’assujetti qui lui confère la faculté d’exercer 25 % ou plus des droits de vote afférents à celles-ci;
  2. Elle détient, même indirectement, ou bénéficie d’un nombre d’actions, de parts ou d’unités d’une valeur correspondant à 25 % ou plus de la juste valeur marchande de toutes les actions, parts ou unités émises par l’assujetti;
  3. Elle a une influence directe ou indirecte telle que, si elle était exercée, il en résulterait un contrôle de fait de l’assujetti, par exemple, en vertu d’une convention d’actionnaires ou d’indivision;
  4. Elle est le commandité d’une société en commandite, ou si le commandité est une personne morale, la personne physique qui exerce un contrôle de droit ou de fait sur le commandité;
  5. Elle est le fiduciaire de l’assujetti;
  6. Toute autre condition additionnelle fixée par le gouvernement.

Lorsque des personnes physiques qui détiennent des actions, des parts ou des unités d’un assujetti conviennent d’exercer conjointement les droits de vote afférents à celles-ci et que cette entente a pour effet de leur conférer ensemble la faculté d’exercer 25 % ou plus de ces droits, chacune d’elles est considérée être un bénéficiaire ultime de l’assujetti. Finalement, une personne physique exploitant une entreprise individuelle est présumée en être le seul bénéficiaire ultime, à moins qu’elle ne déclare le contraire.

Sanctions applicables en cas de non-respect

Les pénalités et les mesures administratives déjà prévues à la LPLE s’appliqueront en cas de non-respect des nouvelles obligations. En vertu de la LPLE, le REQ peut se prévaloir de sanctions administratives telle la radiation d’office des entreprises qui ne se conforment pas à une obligation et de sanctions pénales correspondant à des amendes de 500 $ à 25 000 $. 

À quel moment entreront en vigueur les nouvelles obligations?

Les nouvelles obligations entrent en vigueur le 31 mars 2023. C’est à partir de cette date que les personnes visées seront tenues de fournir les renseignements à divulguer au REQ.

Vous devrez donc fournir ces renseignements au REQ au plus tard lors de la production de votre première déclaration de mise à jour annuelle suivant la date d’entrée en vigueur desdites obligations. Il est important de noter que, compte tenu de l’ajout de ces nouvelles obligations, une entreprise qui aura indiqué, à compter du 31 mars 2023, dans sa déclaration de revenu que les informations la concernant sont à jour au registraire des entreprises, sera automatiquement considérée en défaut et devra donc se conformer à ces nouvelles obligations dans les 60 jours de la demande faite par le REQ en déposant une déclaration de mise à jour courante déclarant ces nouvelles obligations.

Nous recommandons donc fortement que les entreprises immatriculées au Québec assujetties à ces nouvelles obligations déposent leur prochaine déclaration de mise à jour annuelle indépendamment de leur déclaration de revenus.

C’est à partir du 31 mars 2024 seulement qu’il sera possible d’effectuer une recherche au registre des entreprises à partir du nom et du prénom d’une personne physique.

Conclusion

Si les changements annoncés supposent un fardeau administratif supplémentaire, ils visent à rebâtir la confiance du public dans un souci de transparence. Plus largement, ils contribuent à la lutte internationale contre les paradis fiscaux et la corruption. Pour suivre le droit chemin et vous conformer aux nouvelles règles, n’hésitez pas à faire appel à notre équipe ou consulter le site web du Gouvernement du Québec au Nouvelles obligations pour la transparence des entreprises | Gouvernement du Québec (quebec.ca).

À propos

Avec nos ressources professionnelles, avocats, notaires et fiscalistes répartis sur l’ensemble du territoire québécois, Cain Lamarre est le cabinet le mieux implanté et l’un des plus importants au Québec.

Communiquez avec nous pour obtenir plus d’informations : loi78@cainlamarre.ca